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Paysage
Je veux, pour composer chastement mes églogues,
Coucher auprès du ciel, comme les astrologues,
Et, voisin des clochers, écouter en rêvant
Leurs hymnes solennels emportés par le vent.
Les deux mains au menton, du haut de ma mansarde,
Je verrai l'atelier qui chante et qui bavarde;
Les tuyaux, les clochers, ces mâts de la cité,
Et les grands ciels qui font rêver d'éternité.
Il est doux, à travers les brumes, de voir naître
L'étoile dans l'azur, la lampe à la fenêtre,
Les fleuves de charbon monter au firmament
Et la lune verser son pâle enchantement.
Je verrai les printemps, les étés, les automnes;
Et quand viendra l'hiver aux neiges monotones,
Je fermerai partout portières et volets
Pour bâtir dans la nuit mes féeriques palais.
Alors je rêverai des horizons bleuâtres,
Des jardins, des jets d'eau pleurant dans les albâtres,
Des baisers, des oiseaux chantant soir et matin,
Et tout ce que l'Idylle a de plus enfantin.
L'Émeute, tempêtant vainement à ma vitre,
Ne fera pas lever mon front de mon pupitre;
Car je serai plongé dans cette volupté
D'évoquer le Printemps avec ma volonté,
De tirer un soleil de mon cœur, et de faire
De mes penser brûlants une tiède atmosphère.Charles Baudelaire
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Au bord de la mer
Près de la mer, sur un de ces rivages
Où chaque année, avec les doux zéphyrs,
On voit passer les abeilles volages
Qui, bien souvent, n’apportent que soupirs,
Nul ne pouvait résister à leurs charmes,
Nul ne pouvait braver ces yeux vainqueurs
Qui font couler partout beaucoup de larmes
Et qui partout prennent beaucoup de cœurs.
Quelqu’un pourtant se riait de leurs chaînes,
Son seul amour, c’était la liberté,
Il méprisait l’Amour et la Beauté.
Tantôt, debout sur un roc solitaire,
Il se penchait sur les flots écumeux
Et sa pensée, abandonnant la terre
Semblait percer les mystères des cieux.
Tantôt, courant sur l’arène marine,
Il poursuivait les grands oiseaux de mer,
Imaginant sentir dans sa poitrine
La Liberté pénétrer avec l’air.
Et puis le soir, au moment où la lune
Traînait sur l’eau l’ombre des grands rochers,
Il voyait à travers la nuit brune
Deux yeux amis sur sa face attachés.
Quand il passait près des salles de danse,
Qu’il entendait l’orchestre résonner,
Et, sous les pieds qui frappaient en cadence
Quand il sentait la terre frissonner
Il se disait: Que le monde est frivole!”
Qu’avez-vous fait de votre liberté!
Ce n’est pour vous qu’une vaine parole,
Hommes sans cœur, vous êtes sans fierté!
Pourtant un jour, il y porta ses pas
Ce qu’il y vit, je ne le saurais dire
Mais sur les monts il ne retourna pas.Guy de Maupassant
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