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Marine
Au fond d'un lointain souvenir,
Je revois, comme dans un rêve,
Entre deux rocs, sur une grève,
Une langue de mer bleuir.
Ce pauvre coin de paysage
Vu de très loin apparaît mieux,
Et je n'ai qu'à fermer les yeux
Pour éclairer la chère image.
Dans mon cœur les rochers sont peints
Tout verdis de criste marine,
Et je m'imprègne de résine
Sous le vent musical des pins.
L'œillet sauvage, fleur du sable,
Exhale son parfum poivré,
Et je me sens comme enivré
D'une ivresse indéfinissable.
De longs groupes de saules verts,
À l'éveil des brises salées,
Mêlent aux dunes éboulées
Leurs feuillages, blancs à l'envers.
Je revois comme dans un rêve,
Au fond d'un lointain souvenir,
Une langue de mer bleuir
Entre deux rocs, sur une grève.André Lemoyne
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Musique sur l'eau
Oh ! Écoute la symphonie ;
Rien n'est doux comme une agonie
Dans la musique indéfinie
Qu'exhale un lointain vaporeux ;
D'une langueur la nuit s'enivre,
Et notre cœur qu'elle délivre
Du monotone effort de vivre
Se meurt d'un trépas langoureux.
Glissons entre le ciel et l'onde,
Glissons sous la lune profonde ;
Toute mon âme, loin du monde,
S'est réfugiée en tes yeux,
Et je regarde tes prunelles
Se pâmer sous les chanterelles,
Comme deux fleurs surnaturelles
Sous un rayon mélodieux.
Oh ! écoute la symphonie ;
Rien n'est doux comme l'agonie
De la lèvre à la lèvre unie
Dans la musique indéfinie.Albert Samain
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