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Beau soir d'hiver
La neige - le pays en est tout recouvert -
Déroule, mer sans fin, sa nappe froide et vierge,
Et, du fond des remous, à l'horizon désert,
Par des vibrations d'azur tendre et d'or vert,
Dans l'éblouissement, la plaine lune émerge.
À l'Occident s'endort le radieux soleil,
Dans l'espace allumant les derniers feux qu'il darde
À travers les vapeurs de son divin sommeil,
Et la lune tressaille à son baiser vermeil
Et, la face rougie et ronde, le regarde.
Et la neige scintille, et sa blancheur de lis
Se teinte sous le flux enflammé qui l'arrose.
L'ombre de ses replis a des pâleurs d'iris,
Et, comme si neigeaient tous les avrils fleuris,
Sourit la plaine immense ineffablement rose.Jules Breton
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Hiver
Des petits bruits feutrés à la fenêtre
Ce sont les flocons du rêve blanc
Qui valsent gaiement,
De-ci, de-là au gré du vent.
Une jolie dentelle de givre
A ourlé les vitres
De dessins exquis.
Dans l'âtre le feu crépite
Et nous offre ses ors en mille pépites,
Sa longue flamme bleue
Eclairant les yeux
Et léchant la braise incandescente.
Dehors, le grand sapin majestueux
Où j' ai vu des geais se réfugier,
Agite ses branches poudrées.
Un rayon de soleil est apparu,
D'aussi jolis diamants je n'ai vu
Scintiller sur la terre.
La colline, là-bas , me donne envie
D'aller soulever son doux tapis,
Mais le blizzard s'en charge.
Au jardin, sur le rosier
Un dernier bouton de rose a gardé
D'infimes gouttelettes gelées,
Perles délicates en cristal.
Autour de la maison,
Les oiseaux dans les buissons
Chantent joyeusement.
Hiver, malgré tes bises piquantes,
Tes pluies verglaçantes,
Tes matins de peine,
Tes brumes grises sur la plaine,
Ho hiver, je t'aime
Car je sais que reviendra le printemps!Christiane L'Hermite-Coffrand
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Paysage gris
Déjà cette prairie en commençant l'hiver
Étendait son tapis d'herbe courte et fripée,
Elle languit encore, de plus en plus râpée,
D'un gris toujours plus pâle et moins mêlé de vert.
Et pourtant, il y vient, poussant leur douce plainte,
Dressant l'oreille au vent qu'ils semblent écouter,
Quelques pauvres moutons qui tâchent de brouter
Ce regain des frimas dont leur laine a la teinte.
Mais le vivre est mauvais, le temps long, le ciel froid ;
À la file ils s'en vont, l'œil fixe et le cou droit,
Côtoyer la rivière épaisse qui clapote,
S'arrêtant, quand ils sont rappelés, tout à coup,
Par la vieille, là-bas, contre un arbre, debout,
Comme un fantôme noir dans sa grande capote.Maurice Rollinat
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