• Rêverie
    Oh ! laissez-moi ! c'est l'heure où l'horizon qui fume
    Cache un front inégal sous un cercle de brume,
    L'heure où l'astre géant rougit et disparaît.
    Le grand bois jaunissant dore seul la colline.
    On dirait qu'en ces jours où l'automne décline,
    Le soleil et la pluie ont rouillé la forêt.
    Oh ! qui fera surgir soudain, qui fera naître,
    Là-bas, - tandis que seul je rêve à la fenêtre
    Et que l'ombre s'amasse au fond du corridor, -
    Quelque ville mauresque, éclatante, inouïe,
    Qui, comme la fusée en gerbe épanouie,
    Déchire ce brouillard avec ses flèches d'or !
    Qu'elle vienne inspirer, ranimer, ô génies,
    Mes chansons, comme un ciel d'automne rembrunies,
    Et jeter dans mes yeux son magique reflet,
    Et longtemps, s'éteignant en rumeurs étouffées,
    Avec les mille tours de ses palais de fées,
    Brumeuse, denteler l'horizon violet !

    Victor Hugo

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  •  Bon jeudi...


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  • Novembre
    Captif de l’hiver dans ma chambre
     Et las de tant d’espoirs menteurs,
     Je vois dans un ciel de novembre,
     Partir les derniers migrateurs.
    Ils souffrent bien sous cette pluie ;
     Mais, au pays ensoleillé,
     Je songe qu’un rayon essuie
     Et réchauffe l’oiseau mouillé.
    Mon âme est comme une fauvette
     Triste sous un ciel pluvieux ;
     Le soleil dont sa joie est faite
     Est le regard de deux beaux yeux ;
    Mais loin d’eux elle est exilée ;
     Et, plus que ces oiseaux, martyr,
     Je ne puis prendre ma volée
     Et n’ai pas le droit de partir.

    François Coppée 

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  • Bon mardi...


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  • Il fait Novembre en mon âme
    Rayures d'eau, longues feuilles couleur de brique,
    Par mes plaines d'éternité comme il en tombe !
    Et de la pluie et de la pluie et la réplique
    D'un gros vent boursouflé qui gonfle et qui se bombe
    Et qui tombe, rayé de pluie en de la pluie.
     Il fait novembre en mon âme
    Feuilles couleur de ma douleur, comme il en tombe !
    Par mes plaines d'éternité, la pluie
    Goutte à goutte, depuis quel temps, s'ennuie,
    Il fait novembre en mon âme
    Et c'est le vent du Nord qui clame
    Comme une bête dans mon âme.
    Feuilles couleur de lie et de douleur,
    Par mes plaines et mes plaines comme il en tombe ;
    Feuilles couleur de mes douleurs et de mes pleurs,
    Comme il en tombe sur mon cœur !
    Avec des loques de nuages,
    Sur son pauvre œil d'aveugle
    S'est enfoncé, dans l'ouragan qui meugle,
    Le vieux soleil aveugle.
    Il fait novembre en mon âme
    Quelques osiers en des mares de limon veule
    Et des cormorans d'encre en du brouillard,
    Et puis leur cri qui s'entête, leur morne cri
    Monotone, vers l'infini !
    Il fait novembre en mon âme
    Une barque pourrit dans l'eau,
    Et l'eau, elle est d'acier, comme un couteau,
    Et des saules vides flottent, à la dérive,
    Lamentables, comme des trous sans dents en des gencives.
    Il fait novembre en mon âme
    Il fait novembre et le vent brame
    Et c'est la pluie, à l'infini,
    Et des nuages en voyages
    Par les tournants au loin de mes parages
    Il fait novembre en mon âme
    Et c'est ma bête à moi qui clame,
    Immortelle, dans mon âme !

    Emile Verhaeren

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